
Agores existe depuis de nombreuses années. En quoi ce partenariat avec le réseau des acteurs publics de la restauration collective est-il pertinent ?
Depuis la loi Egalim de 2018, les collectivités locales se réinterrogent sur la qualité de la nourriture qu’elles fournissent dans le cadre de la restauration collective. Elles sont aussi amenées à faire le choix, comme à Angers, de supprimer tous les contenants alimentaires en plastique. Beaucoup de collectivités optaient jusqu’ici pour une gestion concédée vers le privé, environ 40 % de la restauration collective est gérée par le privé, mais la prise de conscience progressive d’une alimentation saine dans la population pousse certaines collectivités à se dire que les Epl peuvent éventuellement être la bonne option pour offrir à la population une nourriture de qualité, valorisant les producteurs locaux et les produits bio, le tout fabriqué sur place avec la création d’une cuisine centrale, etc. Agores comme la FedEpl ont intérêt à réfléchir ensemble à l’ensemble de l’écosystème.
Vous soulignez l’importance d’un écosystème en cours de constitution. Que voulez-vous dire ?
Aujourd’hui, la question alimentaire est regardée dans une globalité par les collectivités : produits bruts en soutien aux filières agricoles locales, équipements pour cuisiner sainement à des coûts accessibles à tous, réduction de l’impact environnemental… Ce qui induit l’existence d’un écosystème sur les territoires. Par exemple, avec la suppression du plastique en restauration collective, est né le projet de laverie industrielle en région parisienne, Semelog. Cette Sem a vocation à assurer la collecte, le nettoyage et le réemploi des contenants de la restauration collective. Nous, à Angers, nous avons internalisé ce lavage car aucune laverie industrielle n’existait sur notre territoire. L’économie mixte, lorsqu’elle se substitue au privé, entraîne donc la création de nouveaux services auxquels la même économie mixte peut répondre. C’est un effet domino.
Est-ce que d’autres services mutualisés sont envisagés, entraînant de fait la création de nouvelles Epl ?
Des légumeries se mettent en place. Car cuisiner des aliments bruts et bio, c’est bien, mais les légumes à éplucher forment à eux seuls un métier. Des projets d’Epl émergent dans ce domaine, notamment à travers les projets alimentaires territoriaux. Je pense aussi au MIN de Montpellier, qui est une Epl et qui concentre tout directement sur place. A Angers, nous avons décidé de passer par un Esat pour l’épluchure des légumes. Une trentaine de personnes en situation de handicap travaillent chaque jour pour nous.
Qu’est-ce qui fait la plus-value d’une Epl ? Le contexte budgétaire, assez tendu, joue-t-il en la faveur de l’économie mixte locale ?
La question financière est ardue et l’argent des Epl ne tombe pas du ciel. Parce que les coûts d’une cuisine centrale sont importants. Mais l’investissement est nécessaire, utile. L’EPL est un moyen de mutualiser les investissements. On l’a vu pendant la crise sanitaire ou encore la crise inflationniste où le secteur privé a mal géré cette période. Du fait de leur position dominante, ils ont cru qu’ils pouvaient passer en force. Nous avons profité de cette crise pour montrer qu’une gestion autonome de la restauration collective était possible. Et franchement, au regard de ce que nous coûtait une externalisation de nos achats, nous avons réalisé une économie énorme. Les communes ont toujours le sentiment de faire des économies quand elles sont en gestion concédée, qu’elles casent la gestion à l’extérieur et qu’elles font ainsi confiance au privé pour gérer ces services-là. 60 % de la restauration collective passe cependant par le public aujourd’hui, sous ces diverses formes. Les Spl de restauration collective ont le vent en poupe actuellement. L’une d’entre elles va voir le jour à Saumur (Maine-et-Loire) dans les prochaines semaines, une autre à Brest, ou encore à St Herblain, La Chapelle sur Erdre et Orvault. Avec Agores pour les compétences métiers et la FedEpl pour celles relevant du juridique, les communes disposent de deux interlocuteurs crédibles pour jeter les fondations de leur projet.