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La Cour de justice de l’Union européenne conforte le contrôle analogue à la française

Publié le 27 janvier 2023

La possibilité pour les sociétés publiques locales de passer des contrats avec leurs collectivités actionnaires en dehors de toute procédure de mise en concurrence découle de la notion européenne de « in house », qui est une relation de quasi-régie entre les deux structures. L’une des conditions d’une telle relation est que les représentants de la collectivité disposent dans la Spl d’un contrôle analogue à celui qu’ils exercent sur leurs propres services. Mais pour une collectivité minoritaire, quel est réellement ce contrôle ?

Le contrôle analogue est en principe exercé par les élus qui sont présents dans les organes de direction de la Spl et y exercent une influence déterminante. Un débat existe donc sur la possibilité pour les actionnaires minoritaires qui ne sont pas directement représentés au sein du conseil d’administration, mais seulement au sein de l’assemblée spéciale, de prétendre concrètement à l’exercice effectif de ce contrôle analogue. La Cour de justice de l’Union européenne vient de réaffirmer la possibilité pour les collectivités de disposer d’un représentant commun, en précisant les conditions dans lesquelles le contrôle analogue peut être retenu.

Dans une affaire relative à une coopération d’expertise entre structures du monde du logement social belge[1], la Cour a eu à apprécier le cas relativement courant d’un élu représentant un actionnaire au conseil d’administration d’une structure in house, alors qu’il est par ailleurs dirigeant au sein d’autres actionnaires de la structure.

En l’occurrence, cet élu était également membre du conseil d’administration de la société de logement social, actionnaire très minoritaire de la structure de coopération. Après avoir longuement rappelé les règles relatives à l’admission d’un contrôle analogue conjoint, la Cour s’est donc spécifiquement interrogée sur les conditions dans lesquelles une même personne peut représenter plusieurs pouvoirs adjudicateurs participants. Suffit-il qu’une personne pouvant représenter un actionnaire soit factuellement présente au conseil d’administration de la structure in house pour que le contrôle analogue puisse, dans les faits, s’exercer au bénéfice de deux actionnaires différents, ou bien un lien juridique de représentation spécifique doit-il être prévu ?

La pertinence du modèle de la Spl reconnue

La Cour tranche nettement en faveur de la nécessité d’un mécanisme juridique spécifique, et pas d’une simple situation concrète. Elle relève en effet que les statuts de la société concernée ne permettaient pas aux actionnaires minoritaires de disposer d’une représentation au conseil d’administration, même commune. Par conséquent, la présence due au hasard d’un dirigeant d’un actionnaire au conseil d’administration ne permettait pas à cet actionnaire de prétendre exercer un contrôle sur la société. Dans ces conditions, cet élu ne pouvait donc pas endosser la représentation de plusieurs actionnaires.

Cet arrêt vient ainsi conforter la solution apportée en France dans le cadre des sociétés publiques locales, pour lesquelles la loi prescrit l’existence d’une assemblée spéciale au sein de la société qui désigne des représentants communs au conseil d’administration. Le lien juridique de représentation en commun est donc formalisé par ce mécanisme de délégation et inscrit statutairement dans le fonctionnement de la Spl.

La Fédération rappelle bien entendu que l’existence du représentant commun désigné par l’assemblée spéciale est une des conditions du contrôle analogue des minoritaires, et que la démonstration concrète d’une influence déterminante exercée par les élus doit également être rapportée. Ceci passe par des modalités spécifiques de gouvernance qui mobilisent les élus concernés et assurent leur rôle effectif au-delà des prescriptions légales.

[1] CJUE, Sambre & Biesme SRCL / Commune de Farciennes contre société wallonne du logement, C-383/21 et C-384/21 du 22 décembre 2022

Par Antoine COLIN-GOGUEL
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