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Île-de-France

Cendrine Chapel, DG de la Sem et Spl funéraire de Paris : « Le public, c’est un tarif en moyenne de 30 % moins élevé que le privé sur les prestations essentielles d’un convoi funéraire »

Publié le 5 juin 2025, par Stéphane Menu

Sonné par la perte d’un marché public face à Funecap, en 2019, la ville de Paris a riposté en créant, à côté de sa Sem, une Spl pour déléguer directement, sans mise en concurrence, des politiques publiques dans le secteur du funéraire qu’elle considère comme essentielles. « Dans ces moments-là, le service public, oui, la recherche de profit, non ». Le slogan du service public funéraire de la capitale dit tout et Cendrine Chapel, directrice générale des deux entités, s’en explique.

Cendrine Chapel, DG de la Sem et Spl funéraire de Paris

La Ville de Paris disposait d’une Sem du funéraire. Elle a décidé de créer une Spl complémentaire. Pourquoi ?

Je ne peux répondre pour les choix politiques de la Ville mais en qualité de dirigeante de la société. Nous faisons de plus en plus face à la concurrence agressive du privé. Créé en 2010, le groupe Funecap a complètement changé la donne du monde funéraire, et ce en quelques années seulement. Funecap répond aux appels d’offres du service public, ce qui n’était pas habituel pour le groupe OGF, leader du secteur. En 2019, Funecap a remporté le contrat de délégation de service public concernant la construction, porte de la Villette, dans le 19e arrondissement, du second crématorium de la ville. Mais aussi en décrochant le contrat lié à la rénovation du crématorium historique du Père Lachaise, dans le 20e. Nous n’avions pas senti venir le coup. Mais Funecap a été mieux-disante et donc la mairie de Paris a fait ce choix, en respectant de fait les règles de la commande publique. Cela a été un choc pour nos équipes puisque 20 salariés ont été transférés à Funecap.

 

Comment en est-on arrivé là ? Comment avez-vous réagi ?

Jusqu’en 1998, le service des pompes funèbres était un monopole communal et ce service public était géré, à Paris,par une régie municipale. La loi Sueur de 1993 a mis un terme à cette situation et la ville de Paris a créé une Sem, la Saempf, pour tenir le cap du service public et éviter que les prix ne flambent avec l’arrivée du privé. Le capital de la Saempf est détenu à 74 % par la ville de Paris, le reste l’étant par des capitaux privés. C’est un statut juridique qui nous a permis de mener à bien des investissements importants sans faire entrer dans le capital d’autres opérateurs privés. Mais le talon d’Achille de la Sem se situe dans le fait que l’on ne peut lui attribuer directement des délégations de service public. Funecap a su tirer profit de cette faille. D’où la décision de créer la Spl PF en 2023, avec le Syndicat intercommunal Sicomu, détenant 1 % du capital (Ndlr, le Sicomu est le syndicat intercommunal du cimetière-crématorium de l’Orme à Moineaux des Ulis, regroupant trois communes, les Ulis, Orsay et Palaiseau). La Spl est un atout juridique qui permet d’éviter la mise en concurrence avec le secteur privé et de poursuivre la mise en œuvre d’une politique publique active, notamment en matière de prix.

 

C’est ainsi que vous avez pu récupérer, en mars 2024, la gestion du funérarium des Batignolles…

Oui, ce dernier était géré depuis des années par OGF. Nous sommes d’ailleurs en pleins travaux actuellement. Nous avons repensé un peu l’entrée, qui n’était guère accueillante, et une salle sera ouverte 24h sur 24 et 7 jours sur 7 pour accueillir les personnes désireuses de se recueillir auprès des défunts. Le funérarium n’est aujourd’hui accessible qu’entre 8h et 18h. Donc, il s’agit d’une amélioration très nette du service public.

 

La Sem et la Spl parisiennes ont-elles les moyens de faire face au privé ?

Nous sommes sur un marché très concurrentiel. On dénombre près de 200 agences sur la seule ville de Paris, sans oublier les agences étrangères. La moitié du marché est détenue par le privé, 18 % par la Spl et ses 15 agences. Notre manière de faire consiste à maintenir des prix en moyenne 30 % en dessous du prix médian pour les prestations essentielles d’un convoi funéraire. L’autre priorité est de maintenir, voire de renforcer les politiques sociales, consistant notamment à prendre en charge les personnes fragiles. Tous les maires de France doivent organiser les obsèques des personnes décédées sur leur territoire, c’est la loi. Mais la Ville de Paris  y ajoute une donnée sociale forte, qui consiste à prendre en charge à 80 % les frais des obsèques des parisiens pouvant justifier de revenus inférieurs à 982 €. Oui pouvons pas faire face au privé mais les forces sont très inégales. Il faut toute notre énergie, toutes les valeurs du service public et l’engagement de tous nos agents. Funecap, c’est 450 M€ de chiffre d’affaires, OGF, 750 M€, et nous, 16 M€ de CA, le dixième « groupe » français, la première Epl. Il est étonnant que d’autres communes ne se mobilisent sur le funéraire public. Nous tenons le cap de notre côté, et notre slogan le résume assez bien : « Dans ces moments-là, le service public, oui, la recherche de profit, non ».

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