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La plaidoyer de Jérôme Barrier pour des territoires en « géosymbiose »

Publié le 23 août 2022, par Stéphane Menu

Directeur de deux Epl (SEBL Grand Est et SAREMM, Jérôme Barrier a récemment publié un livre au titre évocateur : « Réconcilier les territoires – Quel avenir pour nos villes et nos campagnes ? » (Editions Ovadia). A ses yeux, ville et campagne ne s’opposent pas mais se complètent. Il en fait notamment la démonstration à travers les deux Epl qu’ils dirigent depuis près de 35 ans.

(Photo Jérôme Barrier)

La crise des gilets jaunes puis celle du Covid-19 ont posé sur le devant de la scène la notion territoriale, aux contours flous. Dans cet essai, Jérôme Barrier tente justement d’identifier le lien entre la ville et la campagne, en étayant sa démonstration de faits vécus au cours de sa vie professionnelle sur l’interdépendance entre ces deux mondes plutôt qu’une stérile opposition. La réconciliation de ces deux pôles, indispensable à ses yeux, relève d’une « géosymbiose », néologisme dont il s’attelle à poser le concept. Le livre, parcouru d’anecdotes, met en évidence ce que le grand public a du mal à saisir, à savoir les richesses insoupçonnées de l’aménagement du territoire, forgé par des enjeux institutionnels, politiques, économiques, socio-culturels et environnementaux. La France des territoires n’est pas une vision universitaire mais une réalité de tous les jours. Il suffit juste de s’équiper des bonnes lunettes pour en avoir une vision panoptique. Entretien.

Le point de départ de ce livre, c’est votre investissement dans le monde de l’économie mixte locale. Comment les Epl facilitent-elles la réconciliation des territoires que vous appelez de vos vœux ?

Je dirige une Sem à vocation régionale (SEBL Grand Est) et une autre à vocation métropolitaine (SAREMM). Pour cette dernière, nous sommes sur la construction de la ville sur la ville ; pour la première, nous intervenons plutôt en milieu rural et périurbain. Dans les débats auxquels je participe, j’avais toujours été surpris qu’ils tournent essentiellement autour des enjeux de l’aménagement urbain. La crise des gilets jaunes et celle du Covid-19 ont montré que les territoires ruraux et périurbains avaient été trop longtemps laissé dans l’ombre. Le concept de « géosymbiose » repose sur le fait que les habitants d’un territoire ne savent pas vraiment comment ce dernier s’est formé. Or, qui sait par exemple que la ville a été créée en complémentarité des campagnes, pour protéger les récoltes, si précieuses. La ville et la campagne ont toujours été en symbiose mais la spécialisation du traitement des territoires a fini par couper ce lien, à ne plus le traiter comme un ensemble cohérent.

La création du millefeuille territorial a donc accéléré cette séparation…

Oui, on en a oublié que toutes les évolutions sociétales étaient globales, qu’une grande ville ne pouvait vivre sans son hinterland rural, que les problèmes urbains, notamment dans les quartiers prioritaires, avaient peut-être leurs solutions dans les campagnes. La prise de conscience est là. Actions cœur de ville ou encore Petites villes de demain redonnent à cette géosymbiose une dynamique. Le succès du fonds friches, les opportunités offertes d’une réindustrialisation raisonnable dans les bourgs confirment la réinitialisation du logiciel de l’aménagement du territoire. Il est nécessaire d’avoir cette vision holistique.

Le temps politique est malheureusement court, celui de l’aménagement nécessité du temps. Est-ce une difficulté ?

Oui, c’est pour cette raison que les élus doivent avoir une vision à long terme de leur territoire. Les Epl ont cette capacité à intervenir sur le temps long et, la plupart du temps, le stop and go politique a peu de conséquences sur les chantiers qu’elles mènent. Autre point important : il est nécessaire de mieux faire connaître le métier d’aménageur. En dehors de la haute montagne, tout n’est qu’aménagement quand on se promène dans ce pays ! On voit aujourd’hui à quel point les préoccupations environnementales s’imposent. Il y a 25 ans, ce n’était pas pareil mais certains d’entre nous ont su tenir bon. Ainsi, imposer des zones de verdissement dans certains projets faisaient tiquer certains élus qui considéraient l’aménagement comme un moyen de potentialiser les opportunités d’installation d’entreprises. Les temps ont bien changé depuis !

Finalement, pourquoi avoir écrit un tel bouquin ?

Il ne s’agit pas d’un bouquin technique, de pur aménageur. C’est un livre grand public pour dire à chacun que nous sommes tous les acteurs de notre environnement, du maire au citoyen… C’est aussi une question démocratique : les gens boudent les urnes parce qu’ils ne se sentent plus appartenir à un territoire. Or, toutes ces identités ont du sens. Un Picard n’est pas un Breton : plus on aime son territoire, plus on se soucie de son épanouissement…

Pour se procurer le livre, cliquer ici : Essai (pragmaconcept.com)

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