Valérie Létard pose la première pierre d’un Anru 3
La ministre du Logement a annoncé, en clôture des journées nationales de l’Anru, le lancement d’une mission de préfiguration d’un Anru 3, qui sera chargée de définir le contenu, la gouvernance et le tour de table financier d’un futur programme de renouvellement urbain. Une annonce accueillie avec soulagement, même si les conditions de financement de ce programme vont donner lieu à d’âpres négociations, à l’heure ou celui du NPNRU semble déjà battre de l’aile.

Un vif soulagement après une longue attente. Les acteurs du renouvellement urbain, réunis jeudi 12 juin au Centquatre-Paris, ont applaudi sans réserve l’annonce du lancement d’une mission de préfiguration de l’Anru 3 par Valérie Létard, ministre chargée du Logement, en conclusion des journées nationales de l’Anru. « C’est une première victoire et je peux vous dire qu’on est partis de loin » a souligné la ministre, en esquissant les trois axes de cette mission, qui planchera sur « le tour de table financier, le contenu et la gouvernance » du futur programme. « Je n’ai aucun a priori sur la question, a-t-elle poursuivi, et je reviendrai devant le conseil d’administration de l’Anru pour en expliquer les modalités ».
Un premier combat de gagné
Nommé fin janvier 2025 à la présidence de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, Patrice Vergriete a accueilli avec un plaisir non dissimulé cette annonce. Alors ministre chargé du Logement dans le gouvernement d’Elisabeth Borne, c’est en effet lui qui avait signé fin 2023, aux côtés de Christophe Béchu, son ministre de tutelle, et de Sabrina Agresti Roubache, secrétaire d’Etat chargée de la Ville, la lettre de mission confiant à Anne-Claire Mialot, directrice générale de l’Anru, Cédric Van Styvendael, maire de Villeurbanne, et Jean-Martin Delorme, inspecteur général de l’environnement et du développement durable, la rédaction d’un rapport « sur le futur du renouvellement urbain ».
« Une annonce comme ça met du baume au cœur, c’est important pour soutenir les professionnels qui sont sur le terrain », confiait-il à l’issue de la journée. « À la remise du rapport, François Rebsamen, Valérie Létard et Juliette Méadel ont tout de suite dit leur souhait de voir l’Anru se prolonger dans un troisième programme. Après, on est dans un contexte budgétaire compliqué pour le gouvernement et je trouve courageux de pouvoir lancer une mission de préfiguration de l’Anru 3 aujourd’hui. Ces trois ministres ont joué un rôle prépondérant pour y arriver. C’est un combat, vous l’avez senti dans l’émotion de Valérie Létard ».
La ministre du Logement était, il est vrai, particulièrement émue à l’heure de cette annonce, la présence de Jean-Louis Borloo au premier rang, qui fut à la fois son mentor en politique et l’initiateur du premier programme de rénovation urbaine, lui rappelant à la fois le travail accompli et celui qu’il reste à faire : « pour moi c’est un vrai combat, un vrai engagement et un honneur, Jean-Louis, d’être devant toi aujourd’hui. Si nous sommes tous ici pour parler de l’avenir de la rénovation urbaine, c’est parce que tu l’as inventée, c’est parce que tu nous as montré la voie ».
Le financement du renouvellement urbain, sujet de crispation
Ce moment de communion va maintenant céder à la place à des débats plus opérationnels, tant sur les objets qui seront la cible du futur programme que sur le tour de table qui permettra de le financer. Sur ce point, toutes les options sont ouvertes, à en croire Patrice Vergriete : » il y aura Action Logement, mais à quelle hauteur ? c’est à définir. Il y aura aussi l’USH, mais à quelle hauteur ? Est-ce qu’il faut encore qu’il y ait le budget de l’État ? Est-ce qu’il faut une taxe affectée ? Est-ce qu’il faut des crédits européens (ndlr : le rapport « Ensemble, refaire la ville » propose d’inscrire le renouvellement urbain comme axe prioritaire du futur Fonds européen de développement régional) ? Est-ce qu’il faut autre chose ? Ce sera le travail de la mission de préfiguration de le définir ».
Le sujet est, il est vrai, particulièrement crispant à l’heure où, avant même de parler du futur du renouvellement urbain, le financement du NPNRU semble déjà battre de l’aile. Patrice Vergriete et Anne-Claire Mialot ont en effet alerté ces dernières semaines sur un risque de défaut de trésorerie de l’Anru à très court terme, situation tendue que Patrice Vergriete nous a confirmée à l’issue de cette journée : « l’Anru 2 est lancé et nous sommes à un niveau de décaissement maximal parce que nous sommes aujourd’hui au cœur des opérations. L’Anru avait une petite épargne, parce qu’elle avait reçu des financements d’Action Logement et de l’USH, mais à la fin de l’année, compte-tenu du fait que les décaissements ont augmenté, nous serons quasiment à zéro en termes de trésorerie. Or, il va falloir payer la totalité des décaissements en 2026. Nous allons recevoir la partie d’Action Logement qui a été contractualisée, nous savons ce que nous allons recevoir de l’USH et nous savons à peu près ce qui va être décaissé. Résultat, il manque 270 M€. Comme le dernier partenaire c’est l’État, et que celui-ci est un peu en retard, puisqu’il n’a payé que 12% de sa contribution globale, c’est à lui de combler ce déficit et d’apporter les 270 M€ nécessaires. Nous avons pris des engagements vis-à-vis des collectivités locales pour financer les projets et, l’an prochain, nous aurons besoin de 270 M€ de l’État pour tenir les engagements qui ont été pris ».
Pour l’heure et dans un contexte budgétaire particulièrement contraint, avec 40 Md€ d’économies à réaliser sur le budget 2026, le gouvernement ne semble pas prêt à répondre à l’appel de l’Anru, du moins en totalité : « sur le budget, je suis autorisée par Matignon à dire que l’État sera aux engagements de ce qu’il doit, nous a précisé Valérie Létard en aparté. L’État doit 1 milliard d’euros. La quote-part annualisée que représente ce milliard d’euros à horizon 2034, c’est 116 millions d’euros. Il y a trois ans, l’État n’a rien versé, il y a deux ans, rien également. Cette année, j’avais promis 50 millions d’euros, que nous avons payés en février, et là on prévoit d’inscrire 116 M€ dans le projet de loi de Finances pour 2026. Ça ne veut pas dire que je ne continue pas à me battre avec Patrice Vergriete pour trouver des solutions supplémentaires qui permettent aussi, comme le voudrait l’Anru, qu’on ait de la visibilité et des recettes un peu plus régulières qui garantissent de la pérennité, mais c’est un chantier supplémentaire. L’important c’est que, déjà, Matignon veuille tenir ses engagements annuels. Ces 116 M€, c’est ce que je poserai comme base dans les négociations budgétaires au titre du ministère du Logement ».
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