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Anne-Sophie Grave : « CDC Habitat dans une nouvelle manière de produire du logement demain »

Publié le 24 février 2023

La présidente du directoire de CDC Habitat estime que déjà 4 000 logements pourraient être construits dans des opérations urbaines sur des fonciers à reconvertir. « Nous avons décidé dès le printemps 2021 de nous orienter vers le recyclage, et de renouer davantage avec la maîtrise d’ouvrage directe ». C’est « une nouvelle manière de produire du logement demain », en étant soi-même aménageur, en co-production avec des promoteurs. Les premières opérations engagées en 2022 témoignent d’un fort démarrage de cette politique. Après une année 2022 « complexe », CDC Habitat reste « ambitieux sur la production ». L’année 2023, « une année encore difficile », devrait voir 18 000 mises en chantier, et sera « une très bonne année en livraisons ».

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Article proposé par Cadre de Ville, dans le cadre d’un partenariat éditorial avec la FedEpl.

Un peu plus de deux ans après ce mois de décembre 2020 qui l’a vue prendre ses fonctions de présidente du directoire  de CDC Habitat, Anne-Sophie Grave évoque les inflexions qu’elle a données à l’action du plus grand bailleurs social français devenu un acteur global du logement. Et, nous dit-elle, désormais un acteur foncier et aménageur.

Quand elle en prend la présidence du directoire, CDC Habitat est déjà un opérateur global avec une visibilité forte au plan national. « Je souhaitais renforcer la visibilité et l’utilité territoriale« , nous explique-t-elle en ce mois de février 2023. L’ensemble des ESH du Groupe avaient été fusionnées dans CDC Habitat Social, dans une forme de centralisation. « Je souhaitais faire repartir le balancier vers les territoires. Nous sommes bien au service de l’habitat dans les territoires. » Cela voulait dire, pour elle, donner un poids plus important aux directions interrégionales, et un mouvement de déconcentration important dans les prises de décision, mais pas seulement.

Un changement culturel dans l’organisation du Groupe

C’est un véritable changement culturel qui s’est produit au sein de CDC Habitat. « J’ai demandé en 2021 à nos directions interrégionales de travailler à des projets de territoires en co-construction avec les équipes et en associant les collectivités qui sont nos parties prenantes. C’était très nouveau, et ce fut un outil puissant pour fédérer les équipes autour d’un projet. » Ces projets spécifiques à chaque territoire donnent des feuilles de route aux équipes locales, qui s’appuient également sur des expertises nationales. Mais ils sont venus aussi « s’imbriquer » dans le plan stratégique à l’horizon 2026 de CDC Habitat, auquel ils ont donné un contenu jugé « adapté aux territoires », dans un mouvement « bottom-up ».

Le groupe intervient donc de façon spécifique à chaque territoire – et fortement en Outre  Mer – dans des domaines très larges. « Nous nous distinguons désormais d’un autre opérateur par notre capacité à adresser l’ensemble des champs de l’habitat, qu’on parle d’hébergement d’urgence ou du très social avec Adoma, de logement familial classique, d’intermédiaire, d’accession sociale à la propriété et maintenant le logement locatif libre. Plus un rôle d’ensemblier urbain. J’y ajoute le redressement des copropriétés dégradées – qui n’est pas un petit sujet. »

Un rôle majeur : 840 000 logements dans l’orbite de CDC Habitat

Par rapport à son cœur historique, le groupe a beaucoup évolué. Aujourd’hui, CDC Habitat gère plus de 540 000 logements en propre, dont 90 000 outremer.
Outre ces 540 000 unités, dans un « deuxième cercle », les participations minoritaires de CDC Habitat dans des organismes, amènent dans l’orbite du groupe 300 000 autres logements, dont 174 000 dans le cadre de ces partenariats capitalistiques.

Mais qui sont donc les « partenaires » de CDC Habitat qui ne sont pas des filiales ? Ce sont d’abord des Organismes de logement social dont le parc comptait moins de douze mille logements, qui ont choisi de s’adosser à un grand groupe. qui peut détenir 30% à 40% et exerce un contrôle conjoint, mais pas dans un modèle intégré.

Et puis, avec certains CDC Habitat n’a pas noué de partenariat capitalistique, mais joue également un rôle, de façon différente, dans la restructuration du secteur. Ce sont des partenariats purement opérationnels, avec des participations dans des structures communes type Coop accession, comme avec l’Office de Brest. Une est à l’étude avec celui du Pas-de-Calais dans Maisons et Cités. « On peut se retrouver sur des territoires communs », commente Anne-Sophie Grave. « On est dans des SAC avec certains, comme à Toulouse avec la SA HLM Les Chalets. »

On y trouve même des partenaires non concernés par la loi Elan mais juste au-dessus des seuils, comme l’OPH de Metz qui détenait 15 000 logements et a décidé de se rapprocher de CDC Habitat. Il a beaucoup de projet Anru à mener, analyse Anne-Sophie Grave, et unrattrapage en termes de travaux.
On y est venu pour que l’apport que nous pouvions fournir serve à de la production supplémentaire et accélérer les réhabilitations thermiques.

Remonter dans la chaîne de production : de la Vefa à la maîtrise d’ouvrage directe

Autre inflexion importante : CDC Habitat a toujours été un acheteur important de Vefa. Notamment en 2020, CDC Habitat est intervenu de façon contra-cyclique dans le cadre du plan de relance pour acheter aux promoteurs 35 000 logements en Vefa, dont 3 500 dans les villes moyennes. Ces logements « vont être livrés pour une bonne part en 2023, qui sera notre plus grosse année de livraison », indique Anne-Sophie Grave. « Quand on signe en 2020, c’est principalement aujourd’hui qu’on livre. »

En 2021, comme elle l’expliquait à Cadre de Ville au mois de janvier (> Lire son interview), elle donnait comme orientation aux équipes de se repositionner davantage en maîtrise d’ouvrage directe. Dans le même temps, et de façon liée, Anne-Sophie Grave pressent le virage qu’annonce la loi Climat et Résilience alors en discussion – elle est promulguée fin août 2021.

Des prises de position foncières en partenariat avec les promoteurs immobiliers

« Je me suis dit qu’une bonne partie de notre production de demain allait se faire par recyclage foncier, de la reconversion de friches, la transformation de locaux d’activités ou de bureaux en logements. » CDC Habitat, rappelle Anne-Sophie Grave, décide alors au printemps 2021 de se doter d’outils pour aller vers du recyclage. Cela n’est pas sans lien avec le souhait de « remonter beaucoup plus en amont dans la chaîne de production », et donc notamment de retrouver des capacités en termes de maîtrise d’ouvrage directe.

CDC Habitat commence alors à se positionner sur des fonciers, car « le foncier a toujours été le nerf de la guerre ». Et crée le fonds Hab’Initio dans ce but. Trouver des fonciers à recycler cela veut dire s’inscrire dans un temps long, ce qui est nouveau pour le Groupe, « mais c’est la seule façon de sécuriser notre production à quatre-cinq ans ». C’est vital, juge-t-elle, plutôt que de trop dépendre de la production des promoteurs, dont l’activité est cyclique – on le voit bien en ce moment.

Le Groupe CDC Habitat choisit donc de « rééquilibrer ses perspectives de production » et le fait savoir aux acteurs de marché, dans une démarche cohérente avec le rapprochement du terrain et des territoires.

Une évolution « assez radicale »

Anne-Sophie Grave annonce aujourd’hui ce qu’elle considère comme « une évolution assez radicale ». « Un important flux d’affaires nous sont proposées par les promoteurs, qui n’ont pas toujours les moyens de porter les opérations sur les fonciers qu’ils identifient ».

CDC Habitat monte ainsi des opérations qui sont des opérations d’aménagement, et qui sortiront en co-promotion. « On y va en risque, sans conditions suspensives. Nous sommes en capacité de porter le foncier et la phase de transformation. » Une fois identifié le foncier, une société de projet est constituée dont CDC Habitat prend 70% à 80% sur toute la phase de portage, puis « les proportions s’inversent quand on passe en phase opérationnelle ».

En 2022, année de vrai démarrage, les opérations que le Groupe va être en capacité d’engager, sans parler de celles à l’étude, vont développer 4 000 logements. De l’accession privée du logement social et du logement intermédiaire. Ce qui n’est pas négligeable, en recyclage de friches, et en à peine plus d’un an, même si les chantiers attendront la fin des procédures d’autorisation (> Voir l’encadré sur l’opération de Lambersart). « Si nous arrivons à en engager autant chaque année, nous engrangeons une manière différente de produire du logement demain ».

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Par Cadre de Ville
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