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La crise, une opportunité pour préparer l’avenir ?

Publié le 7 décembre 2022

La séance plénière de clôture de la conférence des Outre-mer 2022 s’est tenue au MACTe, le 1er décembre 2022, à Pointe à Pitre. Les intervenants ont répondu à l’interpellation suivante : comment optimiser la gestion de ses ressources pour préparer l’avenir ? Face aux incertitudes, les acteurs de l’économie mixte locale ont des idées pour rebondir.

De gauche à droite : Patrick Vial-Collet, président de la CCI de Guadeloupe, Laurent Blériot, DG de Saeml Cycléa, Romain Lucazeau, directeur de la Scet et Sophie Charles, maire de Saint-Laurent du Maroni (Guyane), président de la Commission Outre-mer à la FedEpl (Photo DR).

Les crises que le monde traverse vont-elles changer la manière d’appréhender l’avenir dans les territoires ? Pour Patrick Vial-Collet, président de la CCI Guadeloupe, « l’avenir est inquiétant, on va vraiment rentrer dans le dur. Il est difficile de positiver les différentes crises car les économies domiennes sont largement dépendantes du tourisme de masse », assure-t-il. Et de poursuivre : « Le tourisme d’affaires n’est guère développé. L’impact de l’exigence liée à l’empreinte carbone à venir est peu lisible à ce jour. Car, jusqu’à preuve du contraire, pour venir faire du tourisme dans les Outre-mer, il faut prendre l’avion. A la hausse des créances des entreprises liée au retard de paiement de la commande publique, il faudra procéder aux remboursement des PGE ou encore des moratoires sur les charges fiscales et sociales. Il est à remarquer que ces prêts n’ont pas permis de croitre ou de faire des recettes supplémentaires mais à combler des trous ». Bref, le tableau est sombre pour les propriétaire des « Hôtels et des Îles », président de la holding propriétaire de Corsair. De plus, la crise en cours liée à l’explosion des prix de la matière première et sera donc plus dure, sévère et impactante. « Dans le second trimestre 2023, il est attendu une baisse de -20% de l’activité touristique dans les Outre-mer. Par ailleurs, l’augmentation du coût de l’énergie sera de 15 % dès janvier 2023 ans les Outre-mer et notamment en Guadeloupe ». Pour autant, le président de la CCI a rappelé que d’autres opportunités se profiler pour éviter une crise plus dure encore, invitant par exemple les entreprises guadeloupéennes à investir dans les énergies renouvelables.

La Scet distingue trois catégories de ressources

Romain Lucazeau, directeur de la Scet, distingue trois grandes catégories de ressources pour permettre aux Epl de mieux anticiper les effets de la crise : « Les Epl en tant qu’organisations et actrices économiques d’intérêt général. Il s’agit pour elles d’être résilientes dans le cadre de plan d’évolution stratégique ou de démarche de transformation, d’actionner l’ensemble des processus de management et de gestion des coûts. Il faudra être agile et savoir anticiper les différentes marges de manœuvre. La deuxième ressource est financière et notamment pose la question des financements publics. Il y a une question autour des cycles des financements publiques. L’évolution des taux directeurs et l’impact sur l’endettement publique risque de rendre la ressource financière rare. Toutefois, cette rareté n’est pas pour tout de suite. Cela exige d’avoir des projets rapides pour mobiliser cette ressource financière (infrastructure, rénovation…). Enfin, troisième ressources, les territoires eux-mêmes, par leur mise en valeur et une mobilisation stratégique en terme de développement économique (soleil, vent, foncier, démographie, situation géographique…), apporteront leur pierre à cet édifice », explique-t-il.

Comprendre son environnement pour mieux innover

Les DG d’Epl présents à ce temps d’échange ont partagé des exemples concrets de pilotage de la performance pour financer la reprise et se projeter dans l’avenir. Laurent Blériot, DG de la SAEML Cyclea, à La Réunion, invite à prendre en compte trois exigences : « Il est nécessaire de comprendre son environnement, de savoir si l’activité de son Epl répond au dit environnement (évolutions actuelles et futures) et de s’interroger sur la technique développée au sein de l’Epl : permet-elle de répondre à cette activité qui elle-même répond aux exigence de mon environnement ? ». Pour Laurent Blériot, « Cyclea a mis en œuvre un travail sur la performance globale de l’entreprise via le déploiement d’une stratégie RSE. Dépendant à 70 % des marchés publics, nous avons entamé un rééquilibrage vers les marchés privés qui pèsent aujourd’hui 60 % de notre chiffre d’affaires », assure-t-il. Même réactivité du côté de la Simar, Sem immobilière de la Martinique, dont le directeur, Bruno Ribac, a impulsé une démarche autour de la crise énergétique (le solaire, ampoules LED, économiseur d’eau, récupérateur d’eau de pluie) et de la maitrise des charges dans l’exploitation du patrimoine. « Plus de 30 000 m² de panneaux solaires sur les bâtiments permettent une production d’énergie pour la consommation d’une ville 7 000 habitants. La perspective est de doubler ce parc », précise-t-il.

Vers un observatoire des emplois à pourvoir dans les Epl ultramarines ?

Sophie Charles, présidente de la Commission OM de la FedEpl, maire de Saint Laurent du Maroni en Guyane, attire l’attention de l’auditoire sur des écueils existant ce jour à prendre en considérant afin de mieux appréhender l’avenir. Elle distingue un double écueil : « La continuité territoriale et les normes européennes non adaptées à la réalité de chaque territoire demeurent des freins à la relance. Il y a un retard sur l’ingénierie. Les jeunes n’ont pas les moyens d’étudier à Bac +4/5 sur leur territoire et encore moins sur les métiers de l’économie mixte locale. Les jeunes s’en vont pour terminer leurs études et ne reviennent pas. Il manque des compétences même si on peut noter certaines disparités selon les différents territoires. Il y a un besoin de mobilisation collective sur ce sujet », explique-t-elle. Elle formule un souhait, un vœu en guise d’axe de travail prospectif pour la commission dont elle a la responsabilité au sein de le FedEpl. « Je plaide pour la mise en place d’un observatoire ou d’une plateforme sur les emplois à pourvoir (quelle compétence, quelle ingénierie) au sein de toutes les Epl de l’Outre-mer afin de permettre une mutualisation ». Une des nombreuses propositions que la FedEpl examinera dans le cadre de sa commission Outre-mer dans les prochains mois.

Par Pierre-Charles POUGOUE
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