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Au programme du nouveau gouvernement…

Publié le 23 juin 2022

Déjà une « loi d’exception » sur la transition écologique s’annonce. A l’aube de la nouvelle mandature présidentielle, traversée par la planification écologique, plusieurs dossiers dans les champs de l’urbanisme et de l’immobilier attendent l’équipe gouvernementale récemment désignée. Déploiement de la lutte contre l’artificialisation des sols, respect des objectifs climat de la France, rénovation énergétique des bâtiments… les défis ne manquent pas. Au-delà, des mues profondes doivent être opérées, comme passer d’un urbanisme de la construction à un urbanisme de la transformation. Focus sur quelques chantiers prioritaires à la mise en œuvre délicate, alors que la baisse des volumes de construction de logements inquiète les porteurs de projet, confrontés également à des pénuries de matériaux.

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Article proposé par Cadre de Ville, dans le cadre d’un partenariat éditorial avec la FedEpl.

À la sortie du conseil des ministres, ce 1er juin, la porte-parole du gouvernement annonçait la présentation « pendant l’été » d’une « Loi d’exception » sur la transition énergétique. Une loi comparable à celle consacrée aux JOP 2024, une loi « radicale » qui permette de « sortir des énergies fossiles », a confirmé Elisabeth Borne ce 2 juin. De nombreux dossiers restent cependant ouverts sur la table gouvernementale

Le ZAN patiente dans l’attente de plusieurs textes d’application

L’ensemble des textes mettant de en musique l’objectif « zéro artificialisation nette », tel que posé par la loi Climat et résilience du 22 août 2021, n’a pas été publié au Journal officiel.

Par exemple, l’article 215 de la loi Climat, instaurant un principe général d’interdiction d’implantation ou d’extension de surfaces commerciales qui engendrerait une artificialisation des sols, n’est toujours pas applicable. Les modalités de ce nouveau dispositif, introduit à l’article L. 752-6 du Code de commerce, ainsi que les projets susceptibles d’être considérés comme engendrant une artificialisation des sols n’ont pas à ce jour été précisés par décret. Or ce texte est attendu avec impatience par les professionnels.

Autre texte, dont la parution est scrutée, car il est intimement lié à la lutte contre l’artificialisation des sols, c’est celui relatif aux modalités d’application de l’article L. 111-26 du Code de l’urbanisme qui définit désormais ce qu’il faut entendre par « friche », c’est-à-dire : « Tout bien ou droit immobilier, bâti ou non bâti, inutilisé et dont l’état, la configuration ou l’occupation totale ou partielle ne permet pas un réemploi sans un aménagement ou des travaux préalables ».

Par ailleurs, l’article 212 de la loi Climat prévoit à titre expérimental pour une durée de trois ans, un nouveau dispositif de certificat de projet devant offrir un cadre juridique sécurisé aux professionnels du secteur immobilier ainsi qu’aux financeurs engagés dans des opérations de recyclage de friches. Mais faute de décret appelé à fixer ses modalités d’application, ce dispositif ne peut pas encore être mobilisé par les porteurs de projet.

Etant précisé que Michèle Raunet, notaire associé chez Cheuvreux, a indiqué, lors d’une conférence sur la loi Climat organisée le 25 mai 2022 par l’Association française des juristes d’entreprise (AFJE), que le certificat de projet pourrait, en outre, avoir les faveurs d’un nouveau texte législatif destiné à en améliorer le fonctionnement.

Et pour finir, sans que la liste ne soit exhaustive, le décret établissant le détail des missions d’analyses, de recensements et de suivi réalisées par les nouveaux observatoires de l’habitat et du foncier, créés par la loi Climat, reste à paraître. C’est important car ces observatoires ont pour objectif de recenser les gisements fonciers afin de concilier les projets de développement des collectivités et la lutte contre l’artificialisation des sols.

Vers un nouveau véhicule législatif pour la déclinaison territoriale du ZAN ?

Indépendamment des textes d’application encore attendus, d’autres, à peine publiés, posent déjà des problèmes de mise en œuvre.

En effet, le décret du 29 avril 2022 définissant les surfaces considérées comme artificialisées et celles comme non artificialisées , ainsi que celui daté du même jour modifiant le contenu du SRADDET et fixant les modalités de territorialisation des objectifs de réduction du rythme d’artificialisation des sols, suscitent une certaine controverse.

En témoigne la consultation en ligne lancée par le Sénat auprès des élus locaux le 19 mai dernier sur la mise en œuvre concrète du ZAN 

Son objectif, précise le communiqué de presse commun de la Commission des affaires économiques et de la Commission de l’Aménagement du territoire et du développement durable du sénat, est de recueillir un grand nombre de témoignages concrets sur les difficultés de mise en application du volet artificialisation de la loi Climat. Et ce qu’il s’agisse de l’évolution des documents d’urbanisme à l’impact sur les permis de construire ou des moyens à la disposition des élus pour valoriser les friches ou désartificialiser les sols.

Surtout, cette démarche pourrait aboutir, à l’issue de la consultation prévue le 27 juin, à une proposition de loi visant à mieux articuler le déploiement d’une politique de sobriété foncière ambitieuse et concertée sur l’ensemble du territoire français.

Il faudra donc surveiller de près les prochains travaux du Sénat

Sans oublier que, parmi le programme de contrôles budgétaires établi par la commission des finances du Sénat pour 2022, figure celui sur les outils financiers pour soutenir l’atteinte de l’objectif de zéro artificialisation nette, confié à Jean-Baptiste Blanc. Le volet financier du ZAN étant naturellement déterminant pour la réussite des ambitions portées par le Gouvernement. Le rapport du sénateur Blanc sera examiné par la commission des finances le 29 juin prochain, nous indique la direction de la communication du Sénat.

L’ordonnance sur l’aménagement des territoires littoraux exposés au recul du trait de côte en sursis ? Il n’y a pas que la lutte contre l’étalement urbain qui est dans la tourmente.

Ainsi, l’ordonnance du 6 avril 2022, qui prévoit notamment la création d’un nouveau bail réel de longue durée et des dérogations à la loi Littoral pour permettre des opérations de recomposition des territoires littoraux exposés au recul du trait de côte ou à d’autres risques naturels, fait l’objet de vives critiques

Concrètement, l’Association des maires de France (AMF) et l’Association nationale des élus du littoral (Anel) contestent le bien-fondé de ce texte, tant sur la forme que sur le fond. Les associations regrettent, dans un communiqué de presse du 19 mai 2022, un texte voté dans l’urgence et dont les outils ne répondent pas aux attentes, ni du point de vue de la sécurité juridique, ni sur celui de la garantie des ressources .

Les deux associations ont donc décidé de saisir le Conseil d’Etat pour l’interroger sur le bien-fondé de ce texte, ce qui n’est pas une démarche usuelle. A ce jour, aucune date d’audience n’a été fixée, nous apprend la Cour suprême.

La rénovation énergétique des logements à la croisée des chemins

Face au dérèglement climatique, un changement de cap se dessine aujourd’hui en faveur de la rénovation énergétique des logements, importants émetteurs de gaz à effet de serre. Et c’est à nouveau la loi Climat qui organise cette nouvelle ère. Après des mesures incitatives, place à des mesures coercitives pour éradiquer progressivement les passoires thermiques, ces logements très mal isolés.

Par exemple, à compter du 1er septembre 2022, les biens en monopropriété (maisons individuelles et logements collectifs ne relevant pas de la loi de 1965) qui font l’objet d’une promesse de vente, et qui portent une étiquette F ou G, seront soumis à un audit énergétique. Cette obligation sera étendue, au 1er janvier 2025, aux logements de classe E et, au 1er janvier 2034, à ceux de classe D. Mais attention, l’audit formule des propositions de travaux, mais ne les impose pas .

Ce dispositif contraignant est à mettre en regard de l’interdiction progressive à la mise en location des passoires thermiques en 2023, sachant que dès la fin août 2022, les loyers des logements classés F ou G ne pourront plus être augmentés.

Or ce nouveau cadre repose sur le diagnostic de performance énergétique (DPE), nouvelle formule, dont la fiabilité vient d’être sérieusement entamée par une enquête d’une association de consommateurs, qui pointe de nombreuses erreurs dans l’établissement de ce document, devenu pivot. Une intervention des pouvoirs publics est donc attendue pour corriger le tir.

A noter que suite au rapport sur l’adaptation de l’habitat au vieillissement publié en mai 2021, une nouvelle aide financière destinée à permettre aux seniors de vivre le plus longtemps possible à leur domicile devrait voir le jour. Baptisée MaPrimAdapt’, elle viserait au sein d’un guichet unique à unifier les différentes aides existantes pour faciliter les démarches d’adaptation du logement.

Une nécessité au regard du vieillissement de la population. Selon l’INSEE, si les tendances démographiques récentes se poursuivaient, la France pourrait compter jusqu’à 21,9 millions de seniors en 2070 d’après le scénario central des projections de population, soit 29 % de la population.

Autres chantiers, pour certains incandescents

Pêle-mêle, on trouve l’avant-projet de réforme du droit des contrats dits « spéciaux » relevant du Code civil, dont le texte a été rendu public récemment par le ministère de la Justice, et qui sera officiellement soumis à consultation publique en juillet 2022

Concrètement, les dispositions relatives à la vente, au bail, au louage d’ouvrage, au prêt, ou encore au mandat vont être rénovées pour les mettre notamment en conformité avec les évolutions jurisprudentielles. Un chantier immense qui s’inscrit dans la suite de la réforme des dispositions du Code civil relatives au droit commun des obligations.

La réforme du droit de la responsabilité civile, qui avait l’objet d’un projet de réforme élaboré par la Chancellerie en mars 2017, suivi de l’enregistrement d’une proposition de loi à la présidence du Sénat en 2020, pourrait également ressurgir des limbes avec des impacts directs pour les acteurs de la construction et de l’immobilier.

Côté chantier judiciaire, le rapport des États généraux de la justice, attendu avec ferveur par des magistrats en colère, sera prochainement remis au garde des Sceaux, qui devra, en outre, mettre en œuvre la réforme de la carte et du statut des cours d’appel, voire contribuer à la réforme constitutionnelle qui n’a pu aboutir sur le précédent quinquennat.

Quant à la RE2020, elle n’a pas fini de se déployer puisque L’État vient de désigner plusieurs acteurs, sous le pilotage du Plan Bâtiment Durable, pour officier sur les contours précis du label RE2020, qui préfigurera la prochaine réglementation environnementale. Les travaux exploreront notamment les différentes voies environnementales identifiées lors de la première phase de concertation du label afin d’aller au-delà des sujets énergie et carbone de la RE2020 : neutralité carbone, mesure des performances énergétiques effectives, bâtiment qui coopère avec les réseaux, confort et santé, gestion durable de l’eau, économie circulaire et biodiversité.

S’agissant de la planification écologique, il a été annoncé, à l’issue du Conseil des ministres du 1er juin dernier, que durant cet été serait présentée une loi d’exception sur l’écologie concernant les énergies renouvelables. Pour l’instant, pas d’informations complémentaires ont pu être présentées.

Pour finir, deux décisions administratives majeures en matière d’environnement sont attendues dans les prochains mois, à savoir l’affaire Grande Synthe et l’Affaire du Siècle, où le Gouvernement pourrait être pris à défaut quant à ses engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre, et payer un lourd tribu de plusieurs millions d’euros  : https://www.cadredeville.com/announces/2022/05/12/emissions-de-ges-le-gouvernement-rend-publique-sa-defense

Cet article « au programme du nouveau gouvernement »  est issu d’un partenariat éditorial avec cadredeville.com, la plateforme des projets urbains qui fournit un service complet d’informations et de data pour ceux qui font la ville de demain.

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