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« En Outre-mer, les Sem immobilières sont incontournables parce qu’elles sont dans l’opérationnel »

Publié le 29 octobre 2021

Les chiffres sont éloquents : les 15 Epl immobilières en Outre-mer représentent 144 000 logements en 2021, soit 72 % du parc de logements sociaux des DROM. Une puissance de feu qui s’explique par l’agilité du modèle et la capacité à porter des projets répondant aux multiples attentes de la population. Philippe Clemandot, responsable du département Immobilier et Développement économique, et Caroline Acosta, chargée de missions Ingénierie territoriale et Outre-mer à la FedEpl expliquent les raisons d’une tel succès.

Les représentants de la FedEpl auditionnés au Sénat en mai 2021

L’ensemble des Sem immobilières Outre-mer sont toutes adhérentes à la Fédération des Epl. La FedEpl est cosignataire du PLOM (Plan Logement Outre-mer) 2019-2022 et a accompagné depuis 5 ans, 9 Sem immobilières ultramarines auprès de la CGLLS (Caisse de garantie du logement locatif social) : 3 Sem pour les aides au redressement, 4 Sem pour les garanties et 2 Sem pour le FSI. Toutes ces données sont disponibles dans l’Observatoire des Sem immobilières 2021, qui consacre un focus aux Sem ultramarines du secteur. Comment expliquer un tel succès ? Pourquoi le modèle des Sem immobilières emporte-t-il l’adhésion des acteurs ultramarins ? Autant de questions auxquelles nos deux spécialistes répondent…

Pourquoi le logement social est-il majoritairement géré par des Sem dans les Outre-mer ?

Caroline Acosta : Cette situation est directement liée au contexte historique. Les Sociétés immobilières d’Outre-mer, les Sidom, étaient gérées à l’origine par l’Etat, avant que les collectivités territoriales n’entrent dans le capital à travers la création de Sem. Les offices HLM n’ont jamais vraiment existé en Outre-mer et les autres acteurs, des ESH (Ndlr, Entreprise sociale pour l’habitat) essentiellement, complètent l’offre de logements sociaux sur place. Un point important est aussi à retenir : 80 % de la population sont éligibles aux logements sociaux dans les territoires ultramarins. D’où l’importance de ce secteur et de la gestion qu’il implique.

Philippe Clemandot : Les collectivités territoriales n’ont pas les mêmes moyens dans les Outre-mer qu’en métropole, tout simplement parce que les ressources fiscales ne sont pas les mêmes. L’Etat a donc longtemps assuré ce rôle, avant que les collectivités n’entrent dans la danse.

En quoi le modèle Epl peut-il s’adapter à ces spécificités ?

PC : Sur place, les élus locaux portent leurs projets politiques, notamment en matière immobilière. Quand on dit des Sem immobilières qu’elles sont le couteau suisse de l’aménagement, en métropole comme en Outre-mer, c’est encore plus vrai chez ces derniers. Chaque projet de construction de logements sociaux réclame la mobilisation de tous les acteurs de la chaîne, de la viabilisation des terrains jusqu’aux aménagements des extérieurs. Seules les Sem immobilières sont en capacité de réaliser une telle performance avec des contraintes aussi grandes à surmonter.

CA : C’est d’ailleurs pour cette raison que les Sem d’aménagement ultramarines ont très vite produit aussi des logements sociaux. Chaque fois que les Sem interviennent, elles construisent des morceaux de ville !

La FedEpl est régulièrement consultée sur le sujet par l’Etat et ses diverses instances sur le sujet. Quelles sont les priorités que vous défendez pour rendre le logement accessible à tous ?

CA : Dans ce secteur, on travaille sur de réelles urgences puisqu’un tiers seulement des besoins en logements sociaux sont remplis ! Il y a de fait une dichotomie énorme entre les besoins en logements et al capacité de production sur place…

PC : A Mayotte, en Guyane, la démographie est galopante. Aux Antilles, la population est vieillissante. A La Réunion, les logements sont vieux et la population jeune. Il y a clairement diversité de situation. La croissance économique n’est pas toujours là pour assurer l’avenir de ces territoires, des ilots d’habitat insalubre persistent. Les Sem immobilières proposent une action multiple. L’un des combats que nous menons à la fédération consiste à prendre en compte les normes locales de production des logements pour que la réalisation des logements aille plus vite. Par exemple, l’art de la construction des logements dans certains territoires n’obligent pas nécessairement à appliquer des normes identiques à la Réunion ou à Dunkerque ! La différenciation territoriale des politiques publiques passe par cette prise de conscience.

CA : Nous travaillons avec les Epl sur l’adaptation des logements à l’environnement local et au changement climatique. Il faut créer sur place une filière de la construction, avec des acteurs très engagés, pour que le coût des matériaux ne soit pas trop élevé. Les remontées de terrain sont nombreuses, notamment, concernant la Guadeloupe et l’Océan indien, par le truchement des Armos (Ndlr, Association régionale des maîtres d’ouvrage sociaux). La FedEpl est un interlocuteur privilégié du PLOM (Plan logement Outre-mer) et des habituels opérateurs de l’Etat (Anct, Anah, ANRU, etc.). La plus-value des Epl immobilières, c’est vraiment d’être dans l’opérationnel !

 

Par Benjamin GALLEPE
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