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Projet de loi ASAP, les assouplissements du droit de la commande publique

Publié le 2 octobre 2020

Adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, le projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP) est actuellement examiné en séance publique à l’Assemblée Nationale. Une série d’amendements du gouvernement est venue assouplir les dispositions applicables tant aux marchés publics qu’aux concessions.

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I – La modification des contrats sans nouvelle procédure de mise en concurrence

Dans le cadre des travaux de la commission spéciale, le gouvernement est venu prévoir par voie d’amendement que les contrats répondant à la définition des contrats de la commande publique au sens du code pourront être modifiés sans nouvelle procédure de mise en concurrence. Il s’agit des contrats pour lesquels une consultation a été engagée ou un avis d’appel à la concurrence envoyé à la publication avant le 1er avril 2016.

Sont ainsi concernés l’ensemble des marchés publics et contrats de concessions, notamment les délégations de service public, dans lesquelles les Epl sont cocontractantes.

II – La création d’un nouveau livre de dispositions relatives aux circonstances exceptionnelles

A l’occasion d’un autre amendement au projet de loi ASAP, le gouvernement est venu créer un dispositif de circonstances exceptionnelles visant à adapter le droit de la commande publique aux cas de guerre, d’épidémie, de pandémie, de catastrophe naturelle ou de crise économique majeure, affectant les modalités de passation ou les conditions d’exécution d’un marché public. Ces mesures seront codifiées aux articles L. 2711-1 et suivants du code de la commande publique.

C’est surtout les cas de pandémie et de crise économique majeure qui risquent d’être mobilisés par les acheteurs dans les Epl pour prendre en compte les conséquences de la Covid.

A cet égard, il appartiendra au pouvoir règlementaire de préciser par décret l’application de l’ensemble ou de certaines des mesures prévues en cas de circonstances exceptionnelles par ce nouveau livre du code de la commande publique.

Le décret devra en particulier déterminer le champ d’application temporel de ces mesures avant et après l’entrée en vigueur du nouveau livre dans le code de la commande publique ainsi que leur durée et leur champ d’application territorial.

Les acheteurs dans les Epl pourront mettre en œuvre ces dispositions dans la passation ou l’exécution d’un marché public à chaque fois que cela sera nécessaire pour faire face aux difficultés liées à la survenance de circonstances exceptionnelles.

Le nouvel article L. 2711-3 du code comprend une nouveauté majeure puisque dans l’hypothèse où les modalités de la mise en concurrence prévues dans les documents de la consultation des entreprises ne peuvent être respectées par l’acheteur dans l’Epl, ce dernier pourra y apporter en cours de procédure les adaptations nécessaires à la poursuite de la procédure, dans le respect du principe d’égalité de traitement des candidats.

Ce nouveau livre du code de la commande publique vient également prévoir que lorsque les prestations objet du marché ne peuvent souffrir d’aucun retard, l’acheteur peut prolonger les délais de réception des candidatures et des offres pour les procédures en cours d’une durée suffisante pour permettre aux opérateurs économiques de présenter leur candidature ou de soumissionner.

Il est enfin prévu que les marchés publics pour lesquels l’organisation d’une procédure de mise en concurrence ne peut être mise en œuvre et dont le terme intervient pendant la période de circonstances exceptionnelles pourront être prolongés par avenant au delà de la durée prévue par le contrat.

III – Les dispositions exonérant les titulaires des marchés

Le dispositif des circonstances exceptionnelles intégré au code de la commande publique comprendra de nombreuses causes d’exonération des titulaires des marchés publics.

Ainsi, lorsque le titulaire ne pourra pas respecter le délai d’exécution d’une ou plusieurs obligations du contrat ou que cette exécution en temps et en heure nécessiterait des moyens dont la mobilisation ferait peser sur lui une charge manifestement excessive, le délai d’exécution pourra être prolongé d’une durée au moins équivalente à celle de la période de circonstances exceptionnelles, sur la demande du titulaire avant l’expiration du délai contractuel.

De même, lorsque le titulaire sera dans l’impossibilité d’exécuter tout ou partie d’un bon de commande ou d’un contrat, notamment en démontant qu’il ne dispose pas des moyens suffisants ou que leur mobilisation ferait peser sur lui une charge manifestement excessive, il ne pourra ni être sanctionné, ni se voir appliquer les pénalités contractuelles, ni voir sa responsabilité contractuelle engagée pour ce motif.

En parallèle, l’acheteur sera autorisé à conclure un marché de substitution avec un tiers pour satisfaire ceux de ses besoins qui ne peuvent souffrir aucun retard,
en dépit des clauses éventuelles d’exclusivité. Par ailleurs, le titulaire du marché initial ne pourra engager, pour ce motif, la responsabilité contractuelle de l’acheteur.

L’exécution du marché de substitution ne pourra en tout état de cause être réalisée aux frais et risques de ce titulaire. 

III – La simplification de certaines procédures pour les entreprises en difficulté et la part de l’exécution réservée aux Pme et artisans

Le volet commande publique du projet de loi ASAP prévoit également à titre dérogatoire que les acheteurs pourront passer certains marchés par une procédure simplifiée pour faciliter l’accès des entreprises en difficulté aux contrats de la commande publique mais aussi réserver une partie de l’exécution des marchés globaux aux Pme et artisans.

La possibilité pour les Epl en tant que Pme de candidater à ces marchés globaux dérogatoires doit encore être précisée.

IV – L’exclusion des marchés de services de représentation légale d’un client par un avocat

Un article du projet de loi ASAP vient enfin exclure du champ du droit commun des marchés publics, les marchés de services ayant pour objet la représentation légale d’un client par un avocat et les prestations de conseil juridique s’y attachant.

En d’autres termes, le code affirmera expressément la possibilité pour une Epl de recourir aux services d’un avocat sans procédure de mise en concurrence classique. Cette mesure revient sur une « sur-transposition » du droit européen à propos des contrats de représentation par un avocat.

 

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Par Julien PEOC’H
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