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Covid-19 – La Commission européenne accompagne les efforts du gouvernement français pour flexibiliser les règles des marchés publics

Publié le 10 avril 2020

Pour faire face à la crise économique et sociale provoquée par la crise sanitaire, la Commission européenne adopte des mesures visant à soutenir les différents cadres législatifs et réglementaires adoptés par les Etats membres. Dans ce contexte, elle a publié le 1er avril dernier une communication encadrant l’assouplissement des règles applicables aux marchés publics dans le contexte de la crise. Décryptage.

Le 25 mars dernier, le gouvernement adoptait le paquet d’ordonnances d’urgence pour faire face à l’épidémie de coronavirus, dont une ordonnance adaptant certaines règles applicables à la commande publique et aux contrats publics (notre analyse dans cet article). Parallèlement à cette mesure nationale, la Commission européenne a publié début avril ses « orientations […] sur l’utilisation des marchés publics dans la situation d’urgence liée à la crise du Covid-19 ». Par le biais de cette Communication, Bruxelles établit ainsi un cadre pour les passations de marchés publics. Objectif ? Permettre aux acheteurs publics de faire des achats en quelques jours ou même en quelques heures si cela est nécessaire.

Donner de la souplesse aux acheteurs publics pour répondre à leurs besoins

La situation de crise sans précédent causée par le Covid-19 met les institutions européennes face à des dilemmes auxquels il faut répondre avec efficacité et célérité. Une des dernières mesures en date, et qui concerne notamment les Entreprises publiques locales, vise à donner une marge de manœuvre plus ample aux acheteurs publics, en les invitant à recourir aux procédures dérogatoires. Avec ces orientations, la Commission veut assurer leur approvisionnement en biens et services de première nécessité. Ainsi, pour la Commission européenne :

La crise sanitaire […] requiert une souplesse d’action pour gérer une augmentation considérable de la demande de biens et de services similaires, alors même que certaines chaînes d’approvisionnement sont perturbées. Les acheteurs publics des États membres sont en première ligne pour la plupart de ces produits et services. Ils doivent garantir la disponibilité d’équipements de protection individuelle tels que les masques et les gants de protection, de dispositifs médicaux, notamment les ventilateurs, et d’autres fournitures médicales, mais aussi celle d’infrastructures hospitalières ou informatiques, pour ne citer que quelques exemples.

La gravité de l’urgence comme critère de détermination des mesures ouvertes aux acheteurs publics

Pour la Commission, les acheteurs doivent analyser le degré de gravité de la situation pour déterminer les mesures qu’ils peuvent adopter.

  • En cas d’urgence : des délais raccourcis

La Commission permet la diminution considérable des délais des procédures ouvertes et restreintes de passation des marchés publics pour permettre l’accélération de telles procédures. En procédure ouverte, le délai peut passer de 35 jours à 15 jours, tandis qu’en procédure restreinte, le délai de remise des candidatures passe de 30 jours à 15 jours et celui de remise des offres de 30 jours à 10 jours.

  • En cas d’urgence impérieuse : procédure négociée sans publication ni mise en concurrence

Dans le cas où la diminution des délais ne serait pas suffisante, cette procédure permet aux acheteurs publics d’acquérir des fournitures et des services dans les plus brefs délais. La commission indique que dans le cadre d’une telle procédure, « les acheteurs publics peuvent négocier directement avec le ou les contractants potentiels, et il n’y a pas d’exigences de publication, de délais, de nombre minimal de candidats à consulter ou d’autres contraintes procédurales ».

Exceptionnellement, la Commission autorise l’attribution directe à un opérateur économique présélectionné dans l’hypothèse où il est le seul en mesure de livrer les fournitures requises dans le respect des contraintes techniques et des délais imposés par l’urgence extrême. Dans ce cas-là, l’acheteur doit en négociant avec un opérateur et lui attribuer directement le marché public

Attention toutefois, le recours à cette procédure doit être exceptionnel et doit répondre à des besoins immédiats, en attendant de solutions plus stables. En droit français, les conditions d’application de ces procédures ont été transposées à l’article R. 2122-1 du Code de la commande publique. En outre, il appartient aux acheteurs de procéder à une analyse au cas par cas des marchés éligibles à cette procédure dérogatoire et de réserver son usage aux seuls marchés devant impérativement être passés pendant cette période de crise sanitaire, pour répondre aux besoins qu’elle suscite. C’est à l’acheteur de pouvoir justifier de l’existence de l’urgence dont il se prévaut.

Une vision audacieuse des marchés publics

Avec ces orientations, la Commission européenne s’aligne sur les mesures prises dans les Etats membres pour assouplir les règles strictes en matière de commande publique. Elle va même plus loin que le gouvernement français en invitant notamment les acheteurs publics à « rechercher des solutions de substitution et penser à collaborer avec le marché ».

Cette orientation semble autoriser les acheteurs à se servir de leur propre connaissance du marché, en allant plus loin que le simple « sourcing » [consacré par l’article 4 du décret du 25 mars 2016 sur les marchés publics qui permet à l’acheteur d’ « effectuer des consultations ou réaliser des études de marché, solliciter des avis ou informer les opérateurs économiques de son projet et de ses exigences »]. Dans tous les cas, les acheteurs publics doivent opter pour ces solutions de rechange après interaction avec les fournisseurs pour vérifier dans quelle mesure celles-ci répondraient à leurs besoins.

Une opportunité à saisir pour les Epl

Cette communication de la Commission ouvre de nouvelles possibilités pour les Epl en les dotant d’un nouvel instrument pour faire face à la crise. Elle permet notamment de répondre aux besoins urgents et aux difficultés concrètes que les Epl pourraient avoir en matière de marchés publics.

Attention toutefois, ces préconisations n’ont vocation à s’appliquer qu’aux marchés publics dont la valeur estimée dépasse les seuils européens. En deçà de ces seuils, les règles nationales prévues dans l’Ordonnance du 25 mars 2020 continuent à s’appliquer.

Retrouvez ici le document de la Direction des Affaires Juridiques de Bercy (FAQ) sur les conséquences de la crise sanitaire sur la commande publique (questions-réponses).

Par Cécilia TERUGGI
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