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L’intelligence artificielle, de la géopolitique aux stratégies de territoires

Publié le 16 octobre 2019

Le Congrès des Epl accueillait cette année à Strasbourg une conférence de Charles Thibout, chercheur associé à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS) en clôture de ses travaux. Avec un objectif : se pencher sur les défis imposés aux territoires par le développement de l’intelligence artificielle (IA).

Charles Thibout @Stéphane Laure

« L’intelligence artificielle n’existe pas »

C’est par cette phrase lapidaire et quelque peu provocatrice que Charles Thibout a ouvert sa conférence sur le sujet lors de la plénière du 10 octobre. Pourtant, le développement de l’IA n’est plus aujourd’hui un horizon mais une réalité à laquelle nous ne pouvons échapper.

Il soulève toutefois un certain nombre de questions d’ordre économique, social et politique qu’il s’agit d’appréhender. Comment les pouvoirs publics peuvent-ils accompagner ces innovations et répondre aux bouleversements qu’elles impliquent dans nos territoires ? Face aux retards pris par rapport aux puissances états-unienne et chinoise, l’Union européenne a adopté une stratégie bien précise. Les collectivités locales sont nécessairement parties prenantes à cet enjeu et ont un rôle à jouer, en faisant appel à leurs capacités à faire travailler ensemble des acteurs différents.

Mais comment un ensemble de techniques de probabilités et d’algorithmes destinés à apprendre à des machines à reproduire des actions répétitives peut-il avoir un impact sur l’action publique locale ?

L’IA n’est ni technologiquement ni politiquement neutre

Du développement des Smart cities aux projets de territoires, la plupart des applications de l’IA concernent les Epl. Pour autant, depuis les origines du mouvement de la cybernétique jusqu’aux penseurs du libéralisme contemporain, ses applications ne sont pas innocentes.

Au-delà des fondements philosophiques et théoriques de l’IA nés de la Seconde Guerre mondiale du cerveau de John McCarthy aux Etats-Unis, d’autres puissances mettent aujourd’hui en oeuvre des moyens colossaux au service de ces technologies : la Chine investit désormais 60 à 70 milliards de dollars par an afin de devenir la première puissance mondiale en s’appuyant sur l’IA.

L’Union européenne (UE) imagine actuellement un plan de développement de 20 milliards d’euros incluant les efforts des Etats membres et des entreprises de l’UE. Ce chiffre impressionnant masque pourtant un engagement qui n’est pas encore à la hauteur du défi : l’ensemble du budget cumulé de la France et de l’Allemagne sur l’IA n’atteint pas celui de la seule ville de Pékin, qui mobilise 2 milliards d’euros par an.

Équilibrer la prédominance des métropoles sur les territoires

De l’automatisation des emplois à la concentration des richesses sur les territoires les plus denses, l’IA pose des questions liées à l’aggravation des inégalités entre territoires comme entre catégories sociales, qui risque de marginaliser la majorité de la population, à commencer par celle des pays développés dont la plupart des emplois pourraient être supprimés et remplacés par des machines.

Le déploiement de ces technologies n’est pourtant pas une fatalité et n’est pas illimité. Les dégâts environnementaux provoqués en particulier par l’exploitation des métaux rares n’apparaissent pas soutenables à moyen terme. Tout n’est donc pas joué en dépit de l’apparente fuite en avant observée depuis quelques années, et le politique devra donc avoir le dernier mot.

Par Benjamin GALLEPE
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